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Pollution des ondes : Le Monde parle de foot sur France Culture   [extrait sonore]

Une fois de plus la côte d'alerte a été largement dépassée sur France Culture. Cette fois c'est le journal Le Monde qui est venu polluer l'antenne, devant les auditeurs consternés, en déversant des lieux communs footballistiques pendant 45 minutes le samedi 8 juillet à 12h45 (émission La rumeur du Monde - 2ème partie).

Cette émission, qui bénéficie honteusement d'une heure de grande écoute, non seulement a accumulé les poncifs mille fois entendus, mais en plus s'est montrée incapable d'en décrypter la naïveté mensongère.

Le football envahit tous les médias. À Radio-France, c'est d'ailleurs la spécialité énervante de France Info. Est-ce trop demander que l'auditeur de France Culture soit épargné par cette logorrhée sportive ? Est-ce qu'on embête le spectateur de TF1 en lui parlant de culture ? Est-ce que le prochain déclin qualitatif de FC sera de diffuser de la publicité ou les cours de la Bourse ?

Et s'il faut vraiment parler du phénomène foot sur FC, du moins que ce soit fait par des sociologues, des historiens, voire des journalistes talentueux comme Jean-Louis Ezine (émission "Culture physique" ou "Vestiaire"), mais pas par des chroniqueurs Mondains, spécialistes du lieu commun.

Les auditeurs en ont marre que les anciens producteurs, pigistes, professionnels consciencieux (et souvent sous-payés) de FC soient désormais remplacés par des stars médiatiques, qui "préparent" manifestement leur émission dans l'ascenseur de la Maison Ronde ("Tiens, et si on parlait de foot aujourd'hui ?") et dont le salaire est tenu secret.

De plus, ces stars à qui on offre une tribune prestigieuse, sont toujours les représentants de groupes médiatiques privés, ce qui en dit long sur la "déontologie" de Laure Adler et Jean Marie Cavada. Incapables d'apprécier la qualité, reconnue par 500 000 auditeurs, des personnels existants de FC, ils s'entêtent dans des recettes libérales éculées : on vire des professionnels expérimentés qui dérangent et on téléphone à des copains qui n'ont jamais fait de radio. Comme beaucoup de libéraux, les dirigeants de France Culture adorent en fait le service public car c'est le seul endroit ou leurs actes ne sont pas sanctionnés par des actionnaires et ou ils peuvent se moquer impunément des auditeurs.

Au minimum, il y a de l'incompétence à changer l'or en plomb, plus précisément en plomb pour les auditeurs et en or pour quelques amis des médias privés. À Laure Adler et Jean Marie Cavada a été confié une chaîne culturelle d'exception : qu'ils la respectent ou qu'ils s'en aillent !

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Ci-dessous, un florilège commenté des propos tenus par Jean Marie Colombani et Alexandre Adler. Bien qu'étant sur l'antenne prestigieuse de France Culture, ils se sont cru comme d'habitude au Bistrot de la Pensée Unique :

¤ "enfer et damnation vont dire certains de nos auditeurs, ils vont encore parler du foot et du football"

Les dix secondes d'autocritique de M. Colombani qui a brièvement conscience de polluer l'antenne.

¤ "nous avions célébré Aimé Jacquet en instituteur de la république"... "le côté éducateur est quand même fondamental dans le sport"

Pour des mômes peu structurés et rendus fous en découvrant à la télé les salaires du foot, il devient difficile de respecter leur instituteur payé 8000 balles, impossible de travailler dur à l'école pour décrocher le bac puis un boulot au SMIC. Le football actuel éduque à une seule chose : c'est l'apprentissage de l'ultralibéralisme, telle cette Coupe du Monde 98, entreprise privée aux bénéfices colossaux, qui a eu l'arrogance d'employer 10 000 bénévoles dans le pays du salaire minimum garanti.

¤ "le succès d'une équipe de France retentit sur le moral de la nation tout entière et aide à la bonne tenue du climat économique en France"

Ici les chroniqueurs Mondains font une confusion : ils confondent le climat économique en France avec la bonne tenue de leur portefeuille personnel. Pour les SDF, les 5 millions de pauvres en France, les jeunes des cités, etc., la galère reprend dès le lendemain des matchs.

¤ "les victoires françaises sur les champs de bataille de l'Euro 2000"... "peut-être que dans l'imaginaire collectif Aimé Jacquet et Roger Lemaire ont tout à fait la place d'un maréchal de France"

Nos fins commentateurs approuvent des deux pieds la beaufitude guerrière du supporter.

¤ "le football français, c'est un système d'éducation qui fonctionne... ca marche alors que le système scolaire français est actuellement en panne"... "on aimerait que dans les classes difficiles ca se passe comme dans l'équipe de France"

Comparaison stupide et malhonnête : tout le monde sait qu'il n'y a pas de problèmes éducatifs dans les systèmes où l'on sélectionne à l'entrée. Les écoles de football rejettent sans pitié les mauvais joueurs, les jeunes espoirs Africains qui ne tiennent pas leurs promesses, alors que l'Éducation Nationale a la difficile mission d'éduquer tous les enfants sans exception.

¤ "la mixité, ou plutôt le mélange des cultures qu'a réussi le nouvel entraîneur de l'équipe de France"... "le football français, c'est un système intégrateur puisque au fond le symbole que représente l'équipe de France c'est l'anti-lepenisme"

C'est ignorer que pour le supporter de base, un joueur Noir qui marque devient français, mais s'il encaisse un but, il redevient un "sale nègre" ou un "yabon banania". Et l'équipe adverse, c'est "l'ennemi". "On les a baisés ces enculés" : phrase entendue dans ma rue populaire, dans la vraie vie, pour la finale de l'Euro 2000. Pour la fin du racisme en France, j'attendrai pour ma part de voir un Noir directeur du journal Le Monde.

¤ "la part que prennent les sports, le foot notamment, dans la vie collective n'est jamais que le signe que nous sommes des sociétés qui vivent en paix"

Est-ce trop demander aux gens du Monde que de jeter un regard sur la guerre économique que nous vivons avec ses millions de victimes précarisées ? Oublient-ils que la Russie qui a participé à l'Euro 2000 fait la guerre en Tchétchénie ?

(juillet 2000)

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