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Des inconvénients de la "speakerine-culture"

Je m'étais promis d'essayer d'élaborer une analyse un peu fouillée des émissions ou de certaines émissions. Malheureusement, pour analyser, il faut écouter, et je n'arrive tout simplement plus à écouter France Culture.

Les lettres et textes divers qui dissèquent remarquablement le sens idéologique de cette dégradation sont assez nombreux pour qu'il ne me semble plus nécessaire de le faire, alors je propose une démarche inversée : la démonstration étant faite, pourquoi ne pas se contenter de citer des exemples épars, aussi épars que mon écoute désormais?

Le dernier date d'avant-hier 12 février 2001. La speakerine (ou l'une des speakerines, je n'ai pas réussi à savoir s'il y en a une ou plusieurs) est devenue une de mes bêtes noires. Sa voix sucrée, sa façon de parler dans un souffle, ses minauderies de potiche sonore, ses attentions d'hôtesse de l'air à l'égard des animateurs d'émissions, leurs tentatives pathétiques de faire croire à une grande connivence entre eux, tout cela me soulève le cœur depuis déjà un certain temps. Mais, dernièrement, les textes qu'elle lit se sont mis à m'accrocher l'oreille : j'ai mieux écouté, et j'ai constaté qu'en effet ils étaient truffés de fautes et d'inexactitudes, et que ces fautes et ces inexactitudes étaient soulignées, voire enrichies, si j'ose dire, de celles que commet cette pauvre fille en déchiffrant - car elle déchiffre, il n'y a pas d'autre mot. Et la voici, lundi qui, ânonnant un de ces textes bandes-annonce devenus aussi racoleurs et infantilisants que ceux de la télé, présente des poèmes d'Afrique du Sud qui sont "sans arshétype militant".

Qu'on ne vienne surtout pas me traiter de terroriste de la culture, comme je sens bien qu'on est capable de le faire, y compris sur France Culture maintenant. Je considère qu'il est grave qu'une personne officiant sur cette radio soit suffisamment inculte pour ignorer un mot aussi démocratisé que le mot archétype et le prononcer tel qu'elle le lit. Et pourquoi pas arshéologue? Oui, pourquoi pas? N'est ce pas son droit, à cette jeune femme, d'ignorer tous ces mots savants qui, en plus, ne se prononcent même pas comme ils s'écrivent? De massacrer le moindre nom propre? De ne pas préparer ses interventions? De mal faire son travail, et de ne même pas s'excuser ensuite? Vive la vulgarisation sur France Culture, radio anti-élitiste qui embauche de gentilles analphabètes sexy pour décorer sa grille et refuse l'oppression culturelle.

Et puis il y a la cerise sur le gâteau : les insupportables "France Culture, prenez le temps", soupirés dès que possible par la même speakerine ou par un des ses clones. On sait que la répétition à outrance d'une affirmation cherche à masquer son contraire: France Culture nous ordonne de prendre le temps quand elle ne le prend plus elle-même; et le temps de quoi? Elle ne se donne même pas la peine de préciser le sens de cette phrase tronquée. Tout est dit : l'ère du vide sémantique, l'ère des mots habilleurs de vide a commencé sur France Culture, enfin. Et que de retard à rattraper ! Tout ce sens à détruire, à découper, à morceler, à faire oublier. Une "résonance" par-ci, un extrait de livre par-là, sans raison, sans contexte. Et en avant le zapping.

Alors, comme j'en ai assez de frémir, d'avoir le cœur qui se serre, de m'agacer, de guetter le prochain trébuchage, la nouvelle énormité, entre deux racolages démagogiques, je vais faire une chose très simple: je vais écrire au Trésor Public et leur expliquer que je veux cesser de payer ma redevance. Il faut dire que je me suis déclarée à eux spontanément, il y a quatre ou cinq ans, alors que je n'ai pas de télé, pour contribuer au financement de Radio France et donc de France Culture. C'était beau, c'était généreux, mais aujourd'hui c'est ridicule.

Valérie - février 2001


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