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Silence médiatique autour de Radio France
 
Deux semaines ont passé depuis le procès grotesque dans lequel Laure Adler et Radio France attaquaient une association d'auditeurs de France Culture. Si l'on excepte Rue89 et Libération
[1] plus la presse régionale, le silence de la presse nationale et de Radio France autour de cette affaire confirme un peu plus le diagnostic fait depuis longtemps par les associations d'auditeurs : Radio France en général et France Culture en particulier sont gangrenés par un invraisemblable réseau de connivences politico-médiatiques. Avec ce corollaire gênant pour France Culture qu'un temple de la connivence a peu de chance de rester longtemps un temple de la connaissance.

Avant l'arrivée de Laure Adler, France Culture avait la particularité d'être une station d'exception, faite uniquement par des producteurs spécialisés du monde des idées et du savoir, souvent proches du monde universitaire et complètement étrangers au monde des médias. Après l'arrivée de Laure Adler, puis de David Kessler, le recrutement à France Culture est devenu principalement politico-médiatico-mondain. Exemples de profils recrutés entre 1999 et 2006 : directeur du groupe Le Monde, président d'Arte, sœur du président d'Arte, dirigeants du Figaro, responsable des Inrocks, filleul de ministre de la culture, fils de diplomate, fille de ministre, conseiller d'Etat, membre du club Le Siècle, neveu et nièce de président de la république, président de la fondation de l'ENS, directrice de Normale Sup, etc. A ces recrutements, il faut ajouter les partenariats avec Télérama, l'Express, le Nouvel Obs, Le Monde des religions… Dans la catégorie hors-concours, signalons l'ineffable Alexandre Adler, géo-stratège approximatif chargé de vendre la guerre d'Irak à des auditeurs abasourdis par l'inanité de ses chroniques.

Inutile de préciser qu'avec tout ce beau monde, les pensées originales n'ont pas tardé à déserter l'antenne de France Culture.

Au passage on a ici l'explication d'un petit mystère : alors que la privatisation de tous les services publics est programmée contre l'avis des peuples par les dirigeants européens, le service public audiovisuel est maintenu en vie pour caser les copains du pouvoir dans des boulots pas trop fatigants, aux frais du contribuable.

Impressions au tribunal
Bien que le prétexte de la plainte fut de condamner une caricature, on n'a pas vu à l'audience de représentant du Canard Enchainé, pas plus que les rebelles pour rire de Charlie Hebdo. Comme quoi la presse satirique sait être aussi muette que la presse des fabricants de missiles quand il s'agit de ne pas égratigner certains notables. De même, Télérama, Le Monde, Le Figaro, L'Express, le Nouvel Obs, Les Inrocks… n'ont pas su trouver le chemin du tribunal de Paris, malgré le plan obligeamment fourni par le RACCFC.


En 1999, Charlie Hebdo osait encore critiquer le virage commercial de France Culture

Devant un public attentif, Antoine Lubrina, le président du Rassemblement des Auditeurs contre la Casse de France Culture (RACCFC) a longuement évoqué son parcours d'instituteur pour les prisons, nourri par l'écoute de la défunte université populaire France Culture et transmettant cette riche culture aux prisonniers. S'attaquer à un instituteur, c'est un beau symbole de la décrépitude intellectuelle de France Culture.

La plaignante, Laure Adler, a tenté de faire pleurer les chaumières dans un numéro très au point de "femme" "blessée" et "harcelée". Un show totalement indécent quand on songe à toutes les femmes ultra compétentes qu'elle a virées avec la plus grande brutalité de France Culture. D'ailleurs, le procureur a fait observer qu'il n'existait pas de plainte pour harcèlement ou diffamation et que le procès en cours portait uniquement sur l'injure publique supposée d'un dessin qui contient la phrase "Vivre et penser comme des porcs". Tout cela confirme que les avocats de Radio France n'ont pas réussi à trouver la moindre diffamation dans les tracts du RACCFC.

Evoquant les Renseignements Généraux, Laure Adler a aussi tenté de faire croire que le RACCFC était une bande de dangereux agitateurs. La réalité est pourtant plus triviale : les manifestations du RACCFC sont connues des RG car déclarées à la Préfecture et ne présentent aucun risque de débordement car elles sont statiques et pacifiques ! Outre une banderole et des tracts, il y a en effet chaque fois une grande table pour recueillir les signatures, les témoignages, les adhésions et les dons.


La fameuse table de manif du RACCFC (photo R.G.)

En fait, il semble que Laure Adler ait amalgamé dans son esprit les très nombreuses critiques reçues pendant sa vie professionnelle pour les mettre un peu vite et sans preuves sur le compte du RACCFC.

Croyant bien faire, le PDG de Radio France a déclaré que l'audience quotidienne de France Culture était passée de 400.000 à 600.000 auditeurs sous la direction de Mme Adler. Hélas, il ignore que selon l'ancien directeur de France Culture, l'audience était déjà à 500.000 en 1997 (source : Le Débat n°95). Indifférente à ces chiffres, Laure Adler se vante sans rire dans Paris Match ou La Montagne d'avoir carrément "doublé" l'audience. Pour un amateur de culture, ces chiffres de boutiquiers ont très peu d'importance mais ils montrent au moins qu'il faut toujours recouper les déclarations de Mme Adler. Sans oublier qu'aux grandes heures de France Culture, une émission écoutée par 10.000 professeurs touchait en fait 1 million d'élèves, point évoqué en interview par le tout premier directeur de la radio culturelle nationale, le compositeur et résistant Henry Barraud.


L'image banale qui a motivé le procès

Le comble du ridicule a été atteint lorsque l'avocat de Radio France a soutenu que le dessin représentait la plaignante en "prostituée". Passons rapidement sur ces troubles ophtalmiques de la cinquantaine. Pour finir, les plaignants se sont vantés de ne pas connaître le livre "Vivre et penser comme des porcs" du philosophe et mathématicien Gilles Châtelet. C'est beau l'ignorance à la tête d'une institution culturelle. Ils ont également exprimé leur détestation des syndicats, qu'ils soupçonnent d'informer les associations d'auditeurs. Les pauvres chéris s'imaginent peut-être qu'on peut mettre au pas un service public culturel sans que l'information ne circule de toute part. Même Le Monde en avait parlé le 7 novembre 1999 : "La situation est d'autant plus tendue que, pour la première fois, on licencie brutalement dans une entreprise traditionnellement feutrée et courtoise qui n'a jamais connu de telles méthodes de management".


Adler, Cluzel, Kessler, le trio gagnant du lifting musclé de France Culture.

Après une plaidoirie passionnée de Maître Olivier d'Antin, l'avocat d'Antoine Lubrina, pour la liberté d'expression, le président du tribunal a conclu en fixant le verdict au 7 septembre 2007.

Pendant le procès, la casse de France Culture continue
On vient d'apprendre l'éviction prochaine et sans explications de Renée Elkaïm-Bollinger, productrice de l'excellente émission De bouche à oreille et de Gérard Gromer, talentueux producteur d`À nouveau la musique, le rendez-vous de la musique contemporaine. Ainsi la mémoire de l'université populaire France Culture continue d'être soigneusement effacée par d'actifs fossoyeurs. Les producteurs compétents sont remerciés et les mondains médiocres sont confirmés. Dans le contexte actuel de verrouillage des médias, gageons qu'à force de matinales serviles et d'émissions d'entertainment, Radio France va rapidement devenir un sujet de risée pour les français.


DDFC
27 juin 2007
Adresse de l'article : http://ddfc.free.fr/silence.htm
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[1] http://rue89.com/2007/06/12/laure-adler-a-la-caricature-amere
     http://www.liberation.fr/actualite/ecrans/260560.FR.php
     http://www.libe.com/rebonds/262034.FR.php


  
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